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Juillet 1962 à octobre 1962

 

Juillet 1962

 

[Le Sentier des Pâramitâ ‑ étapes du Sentier ‑ le Yogi est un être unifié ‑ diverses classifications des Pâramitâ.]

 

         "Pratiquer le Sentier des Pâramitâ", dit La Voix, "signifie devenir un Yogi, en vue de devenir un ascète. "Devenir un Yogi, c'est se trouver en union intérieure dans l'amour et par l'amour. La question se pose : comment et où cela commence-t-il ? C'est précisément là où nous nous tenons, et où nous sommes. Nous avons l'amour et la charité ‑ mais ce sont l'amour et la charité du niveau animal qui sont devenus amour et charité du niveau humain ; toutefois, il y a dedans de l'égoïsme et des traits frustes, de la sensualité et du désir de posséder. Ne pensez-vous pas qu'un grand nombre d'hommes et de femmes d'aujourd'hui se trouvent à ce stade ? Comment peuvent-ils commencer à parcourir, de façon consciente et délibérée, le Sentier des Pâramitâ ? Il nous faut saisir ce que nous avons d'amour et de charité. En sorte que ce Sentier commence par Vairâgya. Le Détachement, la Maîtrise des passions et l'Absence de désirs ‑ c'est là toute l'ascèse. Elle est triple ‑ en s'appliquant au mental, à la psyché et à l'ensemble des sens. Une fausse ascèse vise à être sans affection, au lieu d'être sans attachement, ce qui est la véritable ascèse. Aimer ceux qui nous sont chers peut se révéler un obstacle à moins d'agrandir et aussi d'approfondir notre amour sur le plan de Vairâgya ‑ Détachement. Ne pas aimer ceux pour lesquels nous n'avons pas d'attirance, ce n'est pas pardonner, et, là encore, nous ne pratiquons pas Vairâgya. C'est pourquoi il faut en premier lieu développer cette Parâmitâ médiane, d'une manière subjective, à l'intérieur de notre âme.

         Ceci permet de construire Antahkarana, car ainsi le mental se détache des aversions et attractions, des choses et des êtres qui nous déplaisent mais aussi nous plaisent.

         Le Yogi est unifié en lui-même ; l'ascète indique son mode d'unification ‑ par exemple, la manière de s'unir à des vaisseaux d'iniquité. Comment ne pas être pris d'un frisson au contact du mal ? Etc... Ainsi donc, l'union, partielle et volontaire, avec le bon, le noble, etc., constitue le commencement. Puis vient l'expansion ; qu'est-ce qui peut être exclu du bon et du noble ? Qu'est-ce que le mal, et l'ignoble ? Cela revient non seulement à voir "un monde dans un grain de sable" [W. Blake] ‑ ce qui est la Sagesse, ‑ mais c'est aussi percevoir ce qui est bon dans les choses mauvaises. L'égalité d'âme est de la nature de Dhyâna, mais ce n'est pas la Parâmitâ Dhyâna. Qu'est-ce qui terrifie Arjuna [dans le chapitre XI] quand il voit dans la "Forme Universelle" des détails laids, ignobles, terribles ? C'est l'absence de la pleine perception de Shîla. C'est pourquoi la leçon qui suit immédiatement se trouve dans le XIIème chapitre ‑ l'attitude d'égalité envers les paires des opposés. Lisez la dernière partie de ce chapitre.

         Un véritable Yogi ‑ un être unifié ‑ est, bien entendu, un altruiste. On ne peut, en vérité, exercer les Divines Vérités sans vivre d'abord au bénéfice du genre humain.

         Les Sept Divines Vertus forment la substance dont sont faites les personnalités des Maîtres. Leur grand détachement, Leur profond Isolement, Leur immense Compassion (la mère des 7 Pârâmita), tous ces aspects pointent vers Vairâga. Les gens disent "Pourquoi les Maîtres ne font-Ils pas quelque chose ? Pourquoi permettent-Ils les inégalités ? etc... Eh bien ! ce sont de Divins Vairâgyi.

         L'ensemble des 10 Pâramitâ transcendantales inclut les 3 qui correspondent aux 3 plans qui sont au delà des 7 principes ; reportez-vous au diagramme de la p. 200 de The Secret Doctrine (Vol. I) et lisez ce qui est dit à propos des 3 plans supérieurs, placés au delà de la Chaîne Planétaire. L'homme sur la Chaîne Terrestre est un être à 7 Principes, mais en réalité, il lui faut devenir un parfait nombre 10. Les 3 hypostases de la Première Proposition Fondamentale constituent les aspects métaphysiques de ces Pâramitâ supérieures, ou transcendantales.

         Les Pâramitâ sont humaines, universelles et divines ‑ elles visent la moralité personnelle, égoïque et Monadique. Réfléchissez à cela ; là se trouve l'occultisme pratique.

         La classification des Pâramitâ donnée par Crosbie (dans le Friendly Philosopher, pp.80-1) est une forme modifiée de la quadruple discipline [1] : (1) Viveka, (2) Vairâgya, (3) les 6 qualités (Dama,Shama, Usarati, Titiksha, Shraddhâ, Samâdhâna) et (4) Mumukshutva. Les 6 vertus glorieuses sont les Pâramitâ de La Voix du Silence. Les Pâramitâ qui sont énoncées au nombre de Six et Dix sont exotériques et, si ma mémoire ne me trompe pas, vous les trouverez dans le Saddharma-Pundârika Sûtra [2]. Les sept Pâramitâ de La Voix, avec leur Mère, la Compassion, découlent de la Philosophie Ésotérique.

 

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Août 1962

 

 

[La nature octuple de Krishna dans le chapitre VII de La Bhagavad-Gîtâ.]

 

 

         Aujourd'hui, le calendrier me rappelle que c'est un nouveau mois lunaire, dans lequel Krishna a pris forme il y a quelque 5000 ans. Combien illusoire est le temps, car le Soi en nous, le Divin Krishna, est proche et cher, et ici même ‑ tout près ! Ce Soi est dans votre cœur, votre tête et vos mains. Il voit par vos yeux et parle par vos lèvres. Et le Krishna, l'unique et le même, est ce que j'essaie de trouver et de tenir présent dans ma conscience.

         La forme humaine manifestée de Krishna est celle de son incarnation en tant que Krishna. Il a aussi sa Forme Universelle. La première brille de ses Vibhuti, les Divines Excellences, telles qu'elles sont données dans le chapitre X. La Forme Universelle est ce qui est appelé Vishva Rûpa dans le XIème chapitre. La première est visible mais n'est pas comprise, à moins de comprendre les Vibhuti, par exemple, comprendre que sa forme bleu de nuit est due à certaines de ses Vibhuti, etc... Quant à la Forme Universelle, elle ne peut être vue à moins que l'œil divin ne s'ouvre par des efforts individuels, ou, comme l'a fait Krishna pour son chéla dévoué, Arjuna, par l'effet d'un "don" ‑ naturellement bien mérité.

         La forme de Krishna représente l'aspect unité de l'Esprit se manifestant dans l'aspect diversité de la Matière. Comment les Vibhuti se manifestent-elles, ou s'expriment-elles ? Par le canal de quelle sorte de matière ?  Que veut dire et signifie la Forme Universelle sans forme ? Qu'est-ce que le "Verbe fait chair" ? Réfléchissez dans ce sens.

         Pour ce qui est des clefs servant à comprendre la Gîtâ, c'est la clef psychologique que nous employons le plus souvent, car en vivant notre existence, elle se révèle la plus utile. Mais il y en a d'autres, comme la clef historique, socio-politique, ou encore la clef cosmique. Dans son texte Arctic Home in the Vedas, Tilak en parle, il me semble. Également, dans le Glossaire Théosophique, il est question de la Danse des Gopis, en rapport avec les signes du Zodiaque et la ceinture qui les contient. Voyez aussi l'article de Judge "Deux Clefs perdues ‑ La Bhagavad-Gîtâ et le Zodiaque". Il me semble toutefois que, pour nous, la clef psychologique a son côté fascinant, et aussi pratique.

         La classification des natures de Krishna, donnée dans le VIIème chapitre de la Gîtâ, a quelque chose d'unique ‑ à la fois exotérique et ésotérique. En réalité, sans l'aide de la Sagesse ésotérique de H.P.B., elle donnerait l'impression d'un pur abracadabra. Le XIIIème chapitre apporte des éclaircissements, ainsi que la triple division donnée dans le XVème. La nature "inférieure" de Krishna, [chapitre VII], correspond à la ligne la plus basse de l'évolution humaine. Sa nature supérieure renvoie à la seconde ligne, et Lui-même à la 3ème (voir The Secret Doctrine, I, p.181). Mais n'oubliez pas que le passage cité ici traite de l'évolution humaine. Métaphysiquement, la nature inférieure est une manifestation de Mûlaprakriti, la supérieure est liée à Daiviprakriti, ou Fohat ; et la 3ème, au Logos ou Verbe.

         Je vais essayer ici de proposer à votre réflexion quelque chose de la nature inférieure de Krishna. D'abord, la source de cette nature inférieure est Mûlaprakriti, par l'intermédiaire des trois guna. Comme vous le savez, dans notre classification théosophique, le corps physique, le corps astral, Prâna, Kâma, et le Manas Inférieur constituent l'homme inférieur. Cependant, Kâma et Manas ne forment pas en ce moment une unité soudée. Nous avons en fait à considérer Manas Supérieur, Manas Inférieur et Kâma-Manas. Actuellement, nous avons le Manas Supérieur qui adombre la personnalité mais, du fait que son agent, le Manas Inférieur, a été asservi par Kâma, le Supérieur ne peut pas faire grand'chose, s'il y parvient jamais. Maintenant, notez ceci : ce qui est appelé, dans la Gîtâ, Manas, Buddhi et Ahamkâra ne correspond pas à notre Manas ou notre Buddhi ; le dernier aspect, Ahamkâra, c'est le pouvoir créateur du "JE". Dans la personnalité, il représente Âtma, ou lui correspond. La Buddhi citée dans la Gîtâ n'est pas notre 6ème principe : elle est, dans ce live, tamasique, rajasique ou sattvique. Manas y est le mental dominé par Kâma ; Kâma active Prâna, qui dynamise le corps astral, lequel, à son tour, guide et modèle le corps grossier. Ainsi donc, dans la Gîtâ, Manas, Buddhi et Ahamkâra forment la partie supérieure de la nature inférieure de Krishna, tandis que la terre, l'eau, le feu et la lumière [Âkâsha] participent à la construction du corps. Le feu donne la chaleur, et une sorte de lumière, Âkâsha en donne une autre sorte. Lorsque Manas, par le pouvoir de la volonté, se libère de Kâma, il devient Antahkarana. Ainsi donc, nous avons Kâma-Manas, puis Kâma contrôlé par l'Organe Interne (Antahkârana) ; et, avec l'aide d'Âkâsha il va vers la Monade. C'est le pont. Antahkarana comprend 4 instruments : Manas, Chit, Buddhi, Ahamkâra. Chit est le pouvoir de Manas ‑ contenu en lui ‑ qui peut s'approprier le pouvoir de discernement de Buddhi, avec le pouvoir de volonté d'Ahamkâra pour devenir ainsi le Centre Personnel de Krishna, lequel peut se joindre à la Nature Supérieure ‑ la Monade Âtma - Buddhi - Manas ‑ qui est Daiviprakriti, ou Fohat. Il ne nous est pas possible de mettre en parallèle nos principes théosophiques et les constituants de la nature octuple énumérés dans la Gîtâ [dans ce 7ème chapitre]. La nature inférieure correspond à la personnalité, celle qui est supérieure correspond à l'Individu, et la Monade est Krishna. À ce niveau inférieur, Ahamkâra s'exprime comme "Je suis M. Untel" ; au niveau spirituel, comme "JE SUIS" (Voir, The Secret Doctrine, I,pp.335, etc.).

 

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Krishna correspond métaphysiquement à l'EGO, unifié avec Âtma - Buddhi et, dans l'ordre mystique, il remplit la même fonction que le Christos des Gnostiques, tous deux étant "le Dieu intérieur dans le temple" qui est l'homme.

H.P. Blavatsky

 

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Septembre 1962

 

 

[Karma, facteur de croissance ‑ Le théosophe engagé, et son  Karma "géré" par le Maître ‑ "Chaque Membre un Centre" ‑ Le mauvais Karma : une opportunité pour le bien.]

 

         Aujourd'hui doit apporter son propre Karma, au moyen duquel et par lequel nous vivons, et apprenons à aimer et enseigner ; aussi soyons-en reconnaissants à la Loi Bénie. Sa disposition attentive, infaillible et impersonnelle, en vue d'éliminer ce qui est tordu et restaurer l'harmonie, est une puissante leçon pour nous tous. Les gens adressent des prières à un dieu personnel alors qu'ils devraient faire un juste appel, de la bonne façon, à cette Loi qui voit tout, est attentive à tout et n'est pas aveugle puisqu'elle est la Suprême Intelligence elle-même.

         Le Nouvel An approche et que va-t-il apporter ? Tout ce qui pourra arriver sera pour le mieux, car nous en serons les auteurs, ou bien nous gâcherons l'opportunité offerte. Le Maître est Âtman et aussi Karma, dit Judge. Il ajoute que le Maître se trouve dans chaque phase des alternances de nos jours et de nos pensées. Si nous saisissons le pouvoir de combattre et de faire la guerre aux faiblesses, et aussi de nous épanouir par l'usage du pouvoir de croître, nous pouvons dire que nos mérites et démérites du passé sont répercutés sous la forme de Karma par le Maître. C'est là le point de vue le plus élevé de Karma, et la Gîtâ l'enseigne dans le dernier chapitre. Il est difficile de comprendre que nos désaffections et nos haines, nos mauvaises tendances karmiques puissent être des dons venant du Maître, mais il y a un sentiment qui croît en moi, et avec moi, qu'il en est bien ainsi. Sommes-nous des combattants sincères et conséquents ? C'est là la grande question. Qu'est-ce qui fait cette sincérité et cette attitude constante et conséquente au combat ? C'est la Mémoire ‑ me semble-t-il. Se souvenir qu'il faut combattre, c'est plus de la moitié de la bataille. "Se souvenir par hasard, et oublier par hasard", cela ne peut pas marcher. Nous devons nous souvenir et nous souvenir encore et encore. Garder en mémoire qu'il faut combattre, nous disposer à chercher comment combattre ‑ chercher la connaissance.

          Notre Karma, c'est-à-dire le Karma qui échoit à tout disciple dévoué, est un don du Guru plein de grâce. "Le Guru est Karma" dit Judge. Que veut-il dire par là ? Quand un fidèle s'abandonne tout entier au service de son Maître, il lui abandonne son Karma ‑ c'est-à-dire tout ce qui fait ce Karma depuis le passé. Dans chaque incarnation, nous apportons avec nous d'ordinaire telle quantité de Karma. Quand un disciple fidèle s'abandonne entièrement, la façon dont Karma va être réparti est, pour ainsi dire, prise en compte par son Guru. Tout ce qui arrive est juste ‑ "précisément ce qu'en fait vous avez désiré", dit Judge. Par chaque Karma, nous apprenons ; même le mauvais Karma se transforme en lumière brillante par l'effet de notre souffrance, ou que sais-je encore.       

         Chaque disciple sincèrement dévoué doit s'entraîner dans l'art d'utiliser Karma. Ne pas se rebeller mais accomplir ; ne pas s'abandonner à la commisération sur soi-même, mais conserver une attitude souriante face aux souffrances et aux malheurs ; cela implique et comprend la culture de plusieurs Pâramitâ. Oublier est une entreprise plus difficile que pardonner. La mémoire doit être entraînée à se souvenir d'avoir à vivre les vérités, à appliquer les enseignements. Nous oublions de nous souvenir. D'autre part, combien absurdes, et même risibles, sont les petits morceaux de mémoire qui surgissent et viennent nous frapper ! Le pouvoir causal se trouve, me semble-t-il, dans le Grand Rappel à la mémoire du fait que le Maître est Karma. Il faut garder en pensée à chaque heure, avec chaque respiration, la constance dans la Présence du Guru. La moitié de nos difficultés trouveront leur terme si nous n'oublions pas cela, mais si nous le gardons en mémoire. C'est également le test de notre dévotion envers le Maître. "Ne rejetez personne de votre cœur" a une profonde signification. Là où nous sommes faibles, c'est dans le rappel mental à la mémoire, et dans la silencieuse répétition des textes sacrés. Cela implique idéation. Votre pratique gagnera force et expansion si elle procède depuis la profondeur du Penseur dans le corps. Le fait de pouvoir éprouver de l'amour comme une abstraction pour tous les êtres, quels qu'ils soient, ne peut précéder l'amour pour les âmes compagnes d'une manière concrète.

         Je suis peiné de remarquer que vous trouvez désagréable l'endroit où vous êtes, mais le fait même que Karma vous ait amené à ce type particulier de milieu signifie que c'est une opportunité pour vous. M. Judge a écrit un jour à une personne qui n'était pas disposée à s'engager dans les affaires, qu'elle devrait se mortifier et apprendre, parce que bientôt elle se trouverait dans une situation où le travail de bureau théosophique aurait besoin de ses capacités. Tout peut conduire au service pourvu que vous ayez la bonne attitude face au milieu où vous vous trouvez.

         Si nous prenons ce qu'apporte Karma avec le juste type de Renoncement, et œuvrons avec la Loi, chaque événement deviendra une opportunité. Si les circonstances ont œuvré pour vous amener dans le Sud, vous devriez être capable d'y faire quelque chose. Partout où se trouve un être dévoué, il y a en vérité un Centre Théosophique. À ce propos, si vous lisez l'article de W.Q.J. : "Chaque Membre un Centre", vous trouverez de l'inspiration, si vous le rendez applicable à vous-même.

         Vous n'avez pas à vous soucier de l'atmosphère désagréable où vous vous trouvez parce que, en réalité, lorsque vous comprenez la Théosophie, il n'existe pas de tel endroit. Je comprends bien ce que vous voulez dire. --- est une grande ville et vous y accomplissez un travail important, bien que ce soit aussi la façon pour vous de gagner votre vie, mais H.P.B. a écrit dans le Premier de ses Cinq Messages que, si chacun s'oriente de la bonne façon dans les choses spirituelles, il peut attirer à lui ceux à qui il peut rendre service. Judge a écrit également que chaque membre est un centre de lumière et de vie, et qu'il devrait le devenir effectivement par l'examen de conscience et une ferme prise de position à l'égard de la vie. Vous connaissez assez de la Théosophie pour vous faire une perception claire que, si vous étudiez la grande philosophie et travaillez sur vous-même, vous serez capable d'en tirer plus qu'un simple soutien. Vous pourrez tirer de la philosophie la force d'aider les autres, que ce soit par votre courrier ou vos conversations.

         La Bonne Loi pourvoit à tout si nous travaillons avec elle. Tout notre progrès dépend de l'étendue de notre travail que nous accomplissons avec la Loi. Nous apprenons la Patience et le Renoncement de la bonne espèce, et nous devenons habiles dans l'action, en apprenant à tourner les forces des obstacles, et le mal, en expériences, et en bien.

 

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Octobre 1962

 

 

[Réflexions sur Karma et les Aphorismes sur Karma [3].]

 

 

         Les Maîtres ont déclaré qu'Ils ne peuvent interférer avec le Karma, même celui de Leurs chélas. Leur objectif et Leur méthode visent à "aider la Nature et travailler avec elle". En règle générale, ils "n'interfèrent", ou n'agissent, que lorsque le Tout et l'Ensemble en tirent un bénéfice. Ils ne peuvent aider des individus, ou même des nations et des groupes humains, au détriment d'autres, qu'il s'agisse encore d'individus ou de nations. Qu'est-ce alors qui est impliqué dans l'idée de "prendre sur soi le Karma des autres"? Prenez le cas de H.P.B. : il lui fut demandé ‑ et elle y a consenti ‑ de prendre sur elle le fardeau du Karma d'autres personnes. Or tous les êtres, petits et grands, créent du Karma (Aphorisme 1) ; mais, par ailleurs, chacun peut également devenir "l'agent" de Karma pour ceux qui créent du Karma. Ainsi donc, H.P.B. a pu prendre sur elle le Karma de l'humanité entière, mais, en accomplissant tout ce qu'elle avait à faire, il lui fallait rencontrer ces "agents" ‑ dans son cas, des individus spéciaux comme Judge, Damodar, Olcott, Mme Besant, Sinnett, etc., ainsi que des groupes, comme la S.T. qu'elle a créée. (Comme elle l'a dit, elle était la mère de cette Société, et son fluide magnétique y circulait). En dehors de la S.T. et du Mouvement Théosophique, elle avait une autre tâche et d'autres agents de Karma. Bien sûr, cela n'inclut pas son propre Karma, familial ou national : elle avait à y faire face d'une façon indépendante, pour ainsi dire. Nous sommes tous en train d'apprendre à devenir des êtres Universels, aspirant à servir l'Humanité sans aucune distinction. Or, notre "univers" est petit, mais les mêmes principes sont à l'œuvre. Chaque chéla accrédité reçoit sa part en apprenant à prendre sur lui le Karma des autres. Les étudiants théosophes font un saut et prennent un raccourci, pour ainsi dire, en passant du Karma personnel au Karma universel, et en prenant, dans leur grand pas en avant, le Karma de la famille, de la communauté, de la nation et de la race humaine entière. Là se trouve aussi impliqué le facteur de l'abandon de soi-même et de l'abandon au Soi.

         Karma est un sujet difficile. Métaphysiquement parlant, le Karma de l'Impulsion Naturelle ou l'expression de la Volonté Fohatique, vient en tout premier lieu, et est fondamental ; ensuite, les engagements auto-induits chez l'homme créent le Karma propre de sa Volonté. Une phase supérieure de ce Karma plein de la Volonté est ce que vous scrutez quand vous vous référez au fait que H.P.B. a pris sur elle d'être un bouc émissaire pour le Kali Yuga. L'essai sur "Karma", ajouté à la Lumière sur le Sentier, en présente certaines implications. Bien entendu, il y a le "melting pot" [=creuset] de Karma, ce qui fait qu'il n'y a pas votre Karma et le mien, mais un seul Karma. De quelle manière, au juste, il fonctionne, atteint ses fins, récompense et punit, tout cela reste un puzzle et un mystère. Il se pourrait que nous ne puissions le résoudre à présent, mais certain jour à venir !

         Nous connaissons notre Karma d'une façon très nette par son côté effets : que je sois en bonne santé ou malade, qu'est-ce qui constitue mon caractère, pourquoi ma connaissance est ce qu'elle est, limitée ou autrement, etc. Ce sont là des effets, et les gens sont toujours à la recherche des causes, et ils donnent des réponses : c'est Dieu, l'hérédité, les étoiles, etc... Mais la cause, dans chaque cas, c'est nous-mêmes ‑ notre Karma, c'est-à-dire notre action. Ainsi donc, d'après le côté effets, j'ai connaissance de mon Karma. Nous nous engageons dans une fausse ligne de pensée lorsque, dans la vie présente, nous rencontrons des agents de Karma par le canal desquels nous acquittons Karma et payons nos dettes. Du fait qu'ils soient effectivement nos agents de Karma, il n'y a aucun doute. Mais il y a le Karma non épuisé et il y a d'autres agents. Également, dans la vie collective, il se peut qu'une demi-douzaine d'agents soient utilisés pour l'expérience des effets qui nous reviennent. Le mystère du Karma individuel, vu comme une partie et un aspect du Karma collectif, est une fois de plus, le problème philosophique que pose l'Un dans le multiple. Les gens demandent pourquoi ils souffrent mais, dans 9 cas sur 10, ils acceptent de fausses réponses. Même nos étudiants, à la recherche d'une pleine compréhension ‑ avec l'outil d'une connaissance partielle ‑ se tournent dans la mauvaise direction. Faire à notre propre soi des applications dans le champ de Karma, c'est en vérité une chose difficile.

         Nous répétons nos erreurs. Même si nous connaissons la cause, cela ne nous permet pas de bannir l'erreur ; il nous faut trouver un remède. Prenez un cas très simple ‑ une migraine ; vous pouvez en chercher l'origine dans une mauvaise alimentation mais, pour éliminer la migraine, voilà que vous devez prendre une pilule ! Cependant, cela ne vous dit pas pourquoi cette nourriture vous a donné une migraine ni pourquoi cette pilule l'élimine ! Passer par une expérience est une chose ; en apprendre la leçon en est une autre. Il vous faut remonter à la source de la faiblesse qui a agi comme cause ; non pas trouver quelle sorte d'aliments produit migraine ou indigestion, mais comment et pourquoi les choses se passent ainsi. Autrement, nous nous perdrons dans un dédale d'enchaînements. Sentiments mentaux, ou pensées irrationnelles, constituent la racine, et nous devons régler cela une bonne fois ; une seule cause corrigée éliminera plusieurs mauvais effets. C'est là que le Karma du corps intervient. Non, nous ne tirons pas la leçon de chaque Karma, et nous ne le ferons pas avant d'apprendre le côté remède de Karma : nous mettre debout, livrer le combat de la Grande Guerre. Il n'y a qu'une seule Voie Juste pour toute chose : patience, renoncement et action, basés sur la Science Sacrée, une fois qu'on en a fait l'étude. Vous voyez, nous tranchons dans le tissu des choses de ce monde, pour gagner une Force Céleste.

         Pour ce qui est de neutraliser Karma, et des "trois existences" mentionnées dans l'Aphorisme sur Karma n° 26, voici ce que j'en comprends : bien qu'il y ait toujours des agents de Karma (c'est-à-dire les autres personnes), nous créons du Karma et en ressentons les effets. Mais quand vient le moment et que nous sentons en nous-mêmes qu'il faudrait faire un effort délibéré pour payer notre dette karmique, nous nous tournons naturellement vers le milieu intérieur du mental et du cœur, nous scrutons nos faiblesses et nos pouvoirs, et nous nous mettons à l'ouvrage avec l'aide de la volonté, de la connaissance et des aspirations ; nous réussissons finalement, même si la période de trois existences successives assiste à la mort de ce à quoi nous nous sommes efforcés. N'y a-t-il pas accomplissement du Karma passé par ce que nous faisons maintenant et par la manière dont nous nous y prenons ?

         Quant à l'effort fait par l'homme pour surmonter son Karma et effacer les impressions du passé, nous avons un Aphorisme très important donné dans cette série. Considérez, je vous prie le n° 27, où il est dit que des mesures peuvent être prises par un ego pour réprimer une tendance, éliminer des défauts et les neutraliser, en engendrant des causes opposées, et en affaiblissant ainsi le Karma passé, pour le transmuer en une véritable force karmique pour le bénéfice de l'ego. Veuillez aussi consulter l'Aphorisme n°13. Nous ne créons jamais une forme nouvelle sans disposer de la base d'une impression ancienne ‑ bonne ou mauvaise. Tout comme notre connaissance nouvelle n'est que l'extension d'une ancienne, de même nos impressions nouvelles sont l'extension d'anciennes impressions ‑ qu'elles soient Kâmiques ou Buddhiques. Le transfert des impressions Kâmiques au domaine Buddhique se produit parce que de la connaissance est acquise par l'étude et qu'une application est faite de cette connaissance. Il est possible de transformer nos anciennes impressions en de bonnes forces à l'aide de la connaissance.

         Karma offre toujours des opportunités pour de grands désirs ardents ; votre souhait sera exaucé si votre cœur aspire fortement dans ce sens.

Le Karma national est comme le Karma personnel ‑ nous succombons ou nous vainquons. Une nation est composée de personnes, d'individus, répartis en fait, en deux catégories : les gens qui vivent et agissent comme des personnalités et les autres comme des Individualités. Les premiers sont guidés par l'aspect destin de la Loi ; les seconds, par la connaissance qui enseigne la signification et le mystère de la Libre Volonté ‑ c'est-à-dire la Volonté d'être libéré. Cette libération de la Volonté se fait graduellement. De plus en plus, nous devons agir d'une manière responsable, par des moyens auto-induits et auto-déterminés et, lorsque notre Karma nous tient en échec, découvrir comment faire échec et mat au mouvement de Karma.

 

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[1]    [En réalité, la liste donnée par R. Crosbie énonce les six grandes vertus (shakta sampatti) dont l'ensemble       forme l'une des quatre conditions préliminaires à remplir pour l'étude du Védanta, les trois autres étant,       comme l'indique B.P. Wadia, Viveka, Vairâgya, et enfin Mumukshutva (dont R. Crosbie fait la 7ème "vertu       glorieuse"). Cette énumération se trouve dans l'ouvrage de Shankarâcharya, Tattva bodha, un traité purement       hindou.]

[2]    [Le "Sûtra du Lotus du vrai Dharma", l'un des textes essentiels du bouddhisme Mahâyâna.]

[3]     [Voir ce texte de W.Q. Judge, Cahier Théosophique, n°157.]

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