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Juillet 1965 à septembre 1965

 

Juillet 1965

 

[Être libéré du doute et du regret, et se tenir au poste que l’on a choisi – impersonnaliser nos émotions ne veut pas dire rejeter toute affection – il y a le Grand Guru, le Mahâtma difficile à trouver, qui est un Chef et un Instructeur appartenant à la Grande Loge et Fraternité – ceux qui sont purs dans leur motif et leur cœur recevront ce qu’ils méritent de protection, comme d’inspiration pour les guider – si l’on persévère, on peut sentir l’œil des Maîtres qui regarde et Leurs Mains qui protègent et guident – Ils aident tous ceux qui Les servent]

 

 

Les Bouddhas sont pleins de Béatitude et de Jouissance, ici et maintenant, en raison de Leur Sacrifice et Service. Ne sommes-nous pas appelés à apprendre la leçon d’une expérience d’Ânanda, à mesure que nous apprenons, appliquons et promulguons ? Et quand  nous tentons de ne pas chercher les fruits de nos karmas [actions], ne développons-nous pas l’attitude intérieure qui considère que quoi qu’il arrive est le mieux ? Et cela ne produit-il pas un contentement intérieur en dernière analyse ? Etendez cette idée à Ceux qui connaissent ce à quoi Ils ont renoncé, et aussi pourquoi et comment Ils l’ont fait. Ils sont Ceux qui guérissent, aident, instruisent et inspirent des milliers de mortels. Et puis, il y a l’état dont parle la Gîtâ – « Ma demeure suprême ». Manvantaras et Pralayas ne troublent guère ceux qui ont atteint ce niveau.

 

         Je ne pense pas que, pour les Bouddhas et les Bodhisattvas, il y ait de la Béatitude mêlée de souffrance. L’aspect pitié de la Compassion est exempt de souffrance. Un médecin peut ressentir de la pitié pour son patient mais, s’il éprouvait de la souffrance, il ne serait pas capable de prescrire ou de faire une opération. Judge a écrit sur ce « Sentier de la Douleur ». Ceux qui ont choisi le Sentier de la Libération retombent dans l’incarnation « après une immensité d’années » ; ils reprennent le fil de l’Évolution.

 

         Bien entendu, les Êtres Bénis ressentent des émotions, mais non comme nous en faisons l’expérience. Il me semble qu’il serait futile de chercher à sonder ce qu’Ils ressentent et comment, face aux ténèbres du mal et de l’ignorance. Nous ne pouvons pas dire que « l’Exilé » est aussi heureux que s’il était « chez lui » ; mais être libéré du doute et du regret, et se tenir au poste que l’on a choisi – voilà des joies en elles-mêmes.

 

         Dans un état ou un autre, le Soi immortel, les Eaux de La Sagesse, et Ceux qui connaissent le Soi du Tout sont vivants, éveillés et au travail. Vous ne pourrez pas manquer, si vous persévérez, de trouver votre vie inondée de Leur souvenir. Mémoire et Méditation forment une paire – nous sommes tout le temps à penser d’une façon ou d’une autre  (et quand nous ne sommes  pas vigilants, nous devrions tourner le mental vers le Maître), selon nos pensées, cogitations, spéculations, ou par véritable répétition, et c’est là la forme la plus élevée. Puisse votre idéation être toujours, et en toute occasion, fixée sur Eux dont vous aspirez à devenir le serviteur !

 

         Impersonnaliser nos émotions ne veut pas dire rejeter toute affection. La Dévotion envers les Maîtres implique affection envers les êtres humains. Nous ne pouvons servir sans avoir de l’amour pour ceux que nous servons. Il y a de l’amour entre le Guru et le chéla ; également entre chaque chéla et ses divers co-disciples.

 

         Nous sommes disciples d’un seul Instructeur, en plus d’un sens et à plus d’un niveau : « Unique est le MAÎTRE - l’ÂME - Âlaya, l’Âme Universelle » [Voix, p 68]. C’est le Logos – le Parent des Sept Dhyâni. Le Triple Âtma qui est le nôtre (voir la Voix p. 35 : « Les Trois qui demeurent dans la gloire et la béatitude ineffable… ») est ce qui lui correspond au niveau psychologique humain. En second lieu, « Fixe le regard de ton âme sur l’étoile dont tu es un rayon » [Voix, p. 48] se réfère au Dhyâni-Buddha originel d’où a émané notre Monade Âtma-Buddhique, l’Eternel Pèlerin.

 

Quand la Dyade devient une Triade, au moment de l’éveil de la lumière du Manas, un nouveau facteur émerge – la parenté de nature de cette Monade Triadique avec le Kumâra-Rishi qui donne la lumière. Finalement, il y a le Grand Guru, le Mahâtma difficile à trouver, qui est un Chef et un Instructeur appartenant à la Grande Loge et Fraternité. H.P.B. est le Guru pour nous tous, car la Loge l’a envoyée, et, dans son message, chacun de nous trouve sa voie ou son sentier. Le Sentier est un, mais chacun le parcourt d’une façon différente, selon l’intensité de sa concentration. J’espère que tout cela se révèlera utile pour vous.

 

         Les liens de l’âme sont l’attache (1) à sa Triade Supérieure et, à travers Elle, au Dhyâni-Buddha vers lequel cette Triade tourne son regard comme son « étoile » ; (2) au Maître que l’affinité Karmique d’âme-esprit constitue comme notre Initiateur dans les Mystères indicibles ; bien souvent, presque toujours, Il appartient au même Rayon ou la même École que notre aspect supérieur Triadique ; (3) à nos collègues et compagnons qui, selon le Karma passé et présent, s’efforcent d’avancer vers la perfection, au côte à côte sur le plan de la personnalité. Tout cela crée nos affinités qui ont l’effet tantôt de bénir, tantôt de damner, comme le dit Judge.

 

La chaîne Guruparampara s’étend depuis le Dhyâni Buddha jusqu’à notre assistant-instructeur, appelé dans la lettre de Judge le « petit guru » […]  Il vous faut réfléchir sur cette chaîne Guruparampara et apercevoir les liens majeurs et importants. La lettre de Judge contient les suggestions dans ce sens. Réfléchissez aussi à la note dans  la Voix  [p. 22], concernant la Salle de Sagesse où seulement nous sommes appelés à voir le Guru – le Père Spirituel. Lisez aussi S.D. Vol.  I,  pp. 567-578. Ne restez pas dans l’ignorance en ce qui concerne la condition de chéla. C’est un thème très important pour une réelle évolution pratique suivant les lignes de la Troisième Proposition Fondamentale.

 

         Ce qu’a dit Judge à propos du Guru et du « petit guru » constitue en soi une énigme. Mais quand on comprend la base philosophique de la chaîne Guruparampara, une grande partie de la difficulté disparaît. Idéaliser une personnalité vivante, sans comprendre, est une mauvaise chose.

 

Mais « idéaliser » sur la base du discernement, et après contrôle, en se référant aux liens supérieurs de la chaîne ainsi qu’aux enseignements, et non pas en acceptant aveuglément tout ce qui est dit, voilà qui est correct et bénéfique. Il y a un bon test : le « petit guru » exploite-t-il le néophyte, interfère-t-il avec son libre-arbitre, lui donne-t-il des ordres, en lui disant, par exemple de s’asseoir et de se lever ;  mais aussi y a-t-il, avant tout, dans les relations avec lui une fraternité qui ne soit pas sentimentale et émotionnelle, mais nourrie de pensée, de volonté, etc. ? Egalement, est-ce un processus de croissance régulière qui aide à vivre la vie spirituelle ? Bien sûr, c’est une affaire qui demande tact et discrétion de la part des deux – le néophyte et son « petit guru », et aussi silence et secret, sans quoi une telle relation tournera au désastre. Dans cette relation existe un test et une épreuve qui s’appliquent à l’un et à l’autre ; ceux qui sont purs dans leur motif et leur cœur recevront ce qu’ils méritent de protection comme d’inspiration pour les guider. Faites donc grandir votre foi et votre confiance quand vous verrez votre propre condition remplie : crédible, capable d’aider et de guider.

 

         Cela fait du bien et cela aide de savoir qu’il y a quelques êtres qui reconnaissent les longs efforts qu’on a pu faire pour tenir bon avec acharnement, et poursuivre la tâche avec la Grande Oeuvre. Si l’on persévère, on peut sentir l’Œil des Maîtres qui regarde et Leurs Mains qui protègent et guident. Bénis soient Leurs Noms et Leurs Formes Immortelles ! On sait à quel point on a pu être indigne et on peut l’être encore, et pourtant, quelle consolation de répéter  « L’ingratitude n’est pas l’un de nos vices » ! Bien sûr, Ils aident tous ceux qui Les servent, car il n’y a pas beaucoup d’instruments à Leur disposition et celui, quel qu’il soit, qui se révèle honnête, sincère et dévoué, reçoit Leur Aide. Ils prennent en considération ces vertus et nous laissent nos vices et faiblesses à surmonter. Dans une grande mesure, notre étude, notre effort et notre sacrifice pour le Travail nous permettent de surmonter nos défauts.

 

 

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Août 1965

 

[Le Maître ne peut être rencontré que dans la Salle de Sagesse – comment distinguer un Guru réel d’un faux  - c’est en nous élevant au plan spirituel que nous pouvons contacter les Maîtres et non en les attirant pour qu’Ils descendent au nôtre –  l’état de sushupti – pendant de longues années, les chélas n’ont même pas le souvenir de ce qu’ils apprennent et assimilent – étude et méditation permettent de construire un nouveau centre de conscience en nous-mêmes]

 

 

         Il nous est demandé dans  La Voix du Silence  [p. 22] de chercher notre Guru dans la Salle de Sagesse ; en d’autres termes, en sushupti. Lisez le paragraphe qui suit et notez qu’il y a quelque chose en nous qui se trouve également dans cette Salle ; nous sommes appelés à fusionner les deux. Lorsque votre Soi Supérieur et votre Guru-Instructeur (H.P.B.) sont constamment dans votre conscience, pendant le sommeil de votre corps, cette conscience, plongeant en sushupti, fait faire au travail un pas en avant, sans que se produise une intervention indésirable des cinq sens et des organes, ou des désirs et des sentiments. C’est le Cœur spirituel, et lui seul, qui peut fonctionner dans la Salle de Sagesse. Si ce Cœur ne fonctionne pas, nous plongeons en sushupti et en émergeons, reposés et rafraîchis, mais non énergisés et illuminés. Cet exercice de préparation à sushupti est d’une importance vitale. Bien sûr, le Maître n’apparaîtra que lorsque le disciple sera prêt – mais comment arrivera-t-il à être prêt ? Le Maître ne peut être rencontré que dans la Salle de Sagesse ; comment nous élever jusqu’à cette Salle pour Le voir, L’entendre, c’est ce qui demande considération et préparation.

 

         D’abord, je vais répondre à celle de vos questions qui concerne la conception du Guru : comment un être peut-il distinguer un Guru réel d’un faux. L’une des expressions favorites de H.P.B. était : « A leurs fruits vous les reconnaîtrez ». Il vous est impossible de connaître l’état et la dignité d’un instructeur, même sur le plan physique – si ce n’est par le seul test de la connaissance. Comment un étudiant en physique et en mathématiques peut-il reconnaître un véritable physicien et mathématicien si ce n’est en mettant à l’épreuve la connaissance que ces maîtres communiquent dans leurs propres sujets, comme pour redresser ce que nous croyons savoir ? Ainsi donc, c’est seulement par notre intuition spirituelle que nous sommes capables de sonder la nature spirituelle d’un véritable instructeur. Appliquez cela déjà à la personne de H.P.B. Comment pouvons-nous savoir que H.P.B. était un véritable instructeur ? Si nous nous en tenons à tout ce disent ses collègues, aussi bien que ceux qui ont vécu et travaillé avec elle, nous pourrons très facilement la reléguer non seulement au niveau humain ordinaire mais peut-être même à un niveau extraordinaire où elle deviendrait un mélange de fausseté et de vérité, de fiction et d’authentique philosophie, etc. Nous devons procéder en nous fondant sur la règle spirituelle : aller de l’enseignement à l’instructeur.

 

         Dans les premières années [de la S.T.], au cours du 1er cycle de 25 ans où les Maîtres étaient souvent visibles, non seulement psychiquement mais même physiquement, beaucoup de gens en vérité Les ont vus, mais comment pouvaient-ils juger de la vrai nature d’un Maître en regardant Son corps physique ? ou même en Le voyant accomplir des phénomènes psychiques et psychologiques ? Pouvons-nous nous faire une idée de ce que connaît un fakir ou un prestidigitateur ordinaires, savoir s’il accomplit ses tours de passe-passe par des moyens purement physiques comme le font tant de gens, ou par des moyens psychologiques, comme y parviennent quelques fakirs et yogis ? Je vais vous donner un exemple tiré de ma propre expérience. Il y a bien des années, à Bombay, près de la Tour Rajabaï, j’ai été spectateur de ce qu’on appelle ordinairement un « truc de la corde ». J’ai vraiment vu, de mes yeux, un petit garçon grimper à la corde et disparaître dans l’air. Certaines personnes étaient si crédules qu’elles tombaient au pied du fakir qui, lui-même, n’avait aucune sagesse mais seulement le pouvoir d’hypnotiser – par ce qu’on appelle l’hypnose collective. Allons-nous juger cet homme comme un sage parce qu’il a accompli le phénomène, et en a tiré plein d’argent ?

 

         Nous en venons maintenant à votre proposition : comment allons-nous Les connaître ? Il n’y a qu’une seule façon : par notre propre développement silencieux. Et comment allons-nous accomplir ce développement  intérieur ? H.P.B. a montré la méthode, tant directement qu’indirectement, dans La Voix du Silence. Elle a indiqué que nous devions contacter le Maître sur le plan spirituel en nous élevant à ce niveau, et non en attirant le Maître pour qu’il descende au nôtre. Ce niveau élevé, à vrai dire, est sushupti. Quand notre conscience se trouve libérée du corps et de ses sens, et de la nature kâmique qui opère même dans la condition de svapna (les rêves ordinaires), nous nous élevons pour ainsi dire jusqu’au plan où fonctionne notre Triade Monadique, dans ce qui est appelé par H.P.B. le corps causal (ou Ânandamaya kosha) dans la classification védantique. Judge en parle comme du vêtement éthéré.

 

         Nous fonctionnons là en sushupti de cette façon, mais n’étant pas accoutumés aux subtiles vibrations de cet état, nous nous endormons et tombons dans la subjectivité. Et là, nous commençons à absorber tout ce qui se trouve dans cet état de conscience pour nous. Retournez, je vous prie, à La Voix du silence et notez bien ce qui est dit [p. 22] : il a dans cette salle « Cela qui est incréé », et qui réside aussi dans le cœur du disciple. En conséquence, il y a une sorte de consubstantialité entre la Salle de Sagesse et la personne qui s’élève jusqu’au plan de cette Salle. Les gens ordinaires en reviennent sans expérience d’aucune sorte, mais ceux qui connaissent l’existence des Maîtres, qui aspirent à devenir des chélas, deviennent, par certaines pratiques sur le plan physique, de plus en plus conscients des activités de « Cela qui est incréé » au niveau de sushupti.

 

         Deux grandes idées sont connues pour avoir le plus grand pouvoir d’éveil de la conscience humaine dans cette subjectivité de sushupti. L’une est l’étude et la méditation concernant la nature et le caractère de la triade Monadique, Âtma-Buddhi-Manas. Ainsi, l’étude et la méditation sur ce sujet constituent un lien important, mais qui n’est pas tout à fait suffisant. Notre Soi Supérieur est situé très loin et il existe de nombreux liens forgés par différentes hiérarchies d’intelligences entre notre conscience sur le plan physique et la conscience de la Triade spirituelle. Le lien qui apporte le plus d’aide est celui des véritables Instructeurs ou Guru.

 

              Il nous faut noter qu’une étude de la nature et des pouvoirs des Maîtres est recommandée à la fois par H.P.B. et par W.Q. Judge. Ceci nous permet, une fois de plus, d’ouvrir un niveau plus intime de notre conscience subjective en sushupti. C’est dans cet état spirituel de conscience que les Maîtres commencent à enseigner leurs chélas. Et, pendant de longues années, les chélas n’ont même pas le souvenir de ce qu’ils apprennent et assimilent, du fait que, lors de leur voyage de retour, ils se trouvent à nouveau saisis dans l’état de svapna et, finalement, dans la vie des sens corporels. Mais, à mesure que nous continuons d’étudier et de méditer sur ces deux sujets, nous commençons à construire un nouveau centre de conscience en nous-même derrière la conscience sensorielle normale ordinaire et nous amenons les deux centres de conscience à se rapprocher de plus en plus par l’effet d’une démarche répétée, et en nous adonnant totalement à une contemplation de ces deux sujets. C’est là la vraie raison de la pratique du recueillement que tant d’instructeurs spirituels recommandent. Dans notre civilisation, le fait de se retirer physiquement n’est ni recommandé, ni possible, mais ce retrait intérieur est possible, et il doit être entrepris par tout étudiant sincère qui désire obtenir directement des Maîtres la lumière capable de le guider. Les enseignements peuvent nous conduire jusqu’ici mais pas plus loin.

 

         Vous me questionnez aussi sur la fonction de l’intuition en rapport avec les Maîtres. Comme H.P.B. le souligne dans le Glossaire Théosophique, l’intuition nous parvient directement dans l’état de sushupti. Elle déclare : « Buddhi, l’Âme Spirituelle, est la cause directe de la condition de sushupti ». Sushupti  est entièrement subjectif pour la plupart des gens parce que, chez eux, Buddhi s’y trouve à l’état passif. L’intuition, ou Buddhi, doit être activée, est-il dit dans La Voix du Silence, dans une note importante. Comment ? En appliquant les principes de correspondance et d’analogie. C’est l’une des façons dont on doit considérer l’intuition au sujet du Soi Supérieur et des Maîtres.

 

         Les gens qui s’élèvent à des plans supérieurs, comme sushupti, doivent prendre des mesures de précaution sur le plan physique, sinon une confusion se produira par l’interpénétration ou le mélange de deux plans opposés. Vous ne pouvez pas comprendre des vérités spirituelles à l’aide des sens et du cerveau, qui sont pleins d’idées personnelles. C’est pourquoi il faut prendre des précautions. La purification du cerveau et des sens est reconnue comme nécessaire dans tous les systèmes d’exercices à la méditation. Il faut purifier un sens après l’autre de la teinture kâmique qui lui est propre, jusqu’à ce que le corps perde sa mémoire inférieure et soit capable de répondre à l’aspect supérieur de sa mémoire.

 

 

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Septembre 1965

 

[Le compagnonnage et l’observance du secret sont deux aspects essentiels de la condition de chéla – faire silence ne signifie pas que nous devenions muets – l’état de chéla est une attitude mentale – une expérience nécessaire : le désespoir – faites un pas vers nous et nous en ferons un vers vous – les tests et les épreuves du chéla sont un fait – l’humilité doit toujours être là, sinon on est perdu – 7 ans de probation –la vie elle-même sert de test]

 

         La descente du Kali Yuga obscurcit et efface complètement notre mémoire spirituelle. Judge a quelque chose de très valable à dire à ce sujet dans ses  Notes sur la Bhagavad-Gîtâ. Notre sagesse intérieure est obscurcie et – pire encore – arrive à être effacée, au point que nous nous mettons à agir comme si  nous ne nous étions jamais souciés de l’état de chéla dans le lointain passé. Les disciples du même Maître, en Le servant, contribuent à créer, soutenir et renforcer le grand lien qui les unit – lien qui n’est que d’un degré inférieur en grandeur par rapport au Lien Puissant qui existe entre le chéla et le Guru lui-même. Entretenez en votre conscience ce lien de la famille spirituelle.

 

         Le compagnonnage et l’observance du secret sont deux aspects essentiels de la condition du chéla. Nous nous mouvons tous ensemble et sommes amenés à assimiler ceux pour qui nous avons de l’attirance ou de l’aversion, ce qui développe l’altruisme et l’impersonnalité.

 

         Au sujet du travail de préparation à l’état de chéla : c’est comme l’examen d’accès à l’Université ; d’une certaine façon, c’est le plus difficile car il prépare à un certain changement ; l’accès à un plan nouveau où l’on se sent comme un étranger maladroit. On ne saisit pas le principe intérieur fondamental : ce ne sont pas les habitudes extérieures et les façons mondaines qu’il faut prendre en main pour commencer ; si le mental et le cœur ne subissent pas un changement, les changements extérieurs, de régime ou d’habillement, ne serviront à rien. Lorsque les gens essaient de contrôler leur parole, ils commencent par leur langue et leurs lèvres ; le résultat est un véritable échec. Faire silence ne signifie pas que nous devenions muets. Il faut commencer par le silence mental. La première démarche consiste à chercher par le soi inférieur à découvrir l’existence du Soi Supérieur, à en étudier la nature et le pouvoir. C’est pourquoi Virâga [cf. La Voix du silence] s’impose comme le premier pas.

 

         Dans la vie du chéla, il n’y a pas de limites qu’on ne saurait jamais dépasser. Comprenez bien ceci de façon métaphysique. Pour commencer, l’état de chéla est une attitude mentale. Cette attitude est celle de l’âme incarnée qui ne tarde pas à apprendre que le véritable véhicule d’incorporation n’est pas le physique mais l’astral. L’idée à imprimer sur la conscience est celle de la continuité  du pouvoir de discernement, que ce soit dans un état de cette conscience ou dans un autre. Cette continuité est un facteur extrêmement important ; en dépendent la vie et le succès final de la condition de chéla.

 

         Cette condition amène, comme une expérience nécessaire, le désespoir. Ce stade n’est-il pas décrit comme « Vishadayoga » [le titre sanskrit du 1er chapitre de la Gîtâ], c’est-à-dire, d’une certaine façon, l’union avec le découragement ? C’est le point de l’expérience à partir duquel Vairâgya  peut être développé. A ce point, Arjuna avait à surmonter l’amour pour sa tribu et la haine pour les Kaurava. L’inspection des armées a une signification. Aussi ne devons-nous pas avoir peur du désespoir, mais bien apprendre à le vaincre de la bonne façon. L’évangile du chéla est chanté dans le 12ème chapitre de la Gîtâ – ces rapprochements par paires sont pleins de significations.

 

         Le mysticisme mineur correspond à l’état de chéla laïque ; le majeur, à l’état de chéla réel. L’aspiration, le désir élevé, c’est par là que nous commençons, ce qui signifie que nous l’avons mérité par Karma. Puis, nous apprenons à connaître les qualifications, ce qui est demandé et attendu de nous, et nous devons faire l’effort de mériter une réponse réelle. Prenez votre propre cas : vos aspirations constituent un premier pas dans la direction des Maîtres, et Ils ont fait cette promesse : « Faites un pas vers nous et nous en ferons un vers vous ». Supposeriez-vous qu’Ils n’ont pas tenu cette promesse dans votre cas ? Réfléchissez à cela dans votre cœur, et avec lui. C’est effectivement un grand sujet, et d’une importance majeure. Poursuivez votre étude de l’article « L’Occultisme et les Arts Occultes[1] ». Mais ne soyez pas effrayé des graves mises en garde qui y sont faites. Tournez-vous vers Judge ; ce sont des enseignements constructifs qu’il donne – en nous indiquant que faire. N’abandonnez pas ce sujet ; mais poursuivez avec patience et confiance.

 

         A chaque stade de l’évolution, il y a ce principe [rappelé dans la S.D.] : « La Nature non aidée échoue ». Dans le règne humain, à des périodes critiques, nous recevons l’aide des Pitri Lunaires, puis des Pitri Solaires. Le règne humain ne serait pas ce qu’il est actuellement sans les Enseignements impartis et implantés en nous et s’il n’y avait pas un effort cyclique accompli de temps en temps. Il en va de même de la vie du chéla. Le chéla est vraiment laissé seul à lui-même, mais pourtant, à la 11ème heure et, à la 59ème minute, arrive la grâce de l’aide. Les Initiations dans les Mystères nous montrent aussi cela. A moins que nous fassions de l’opposition et construisions un mur de séparation, d’une façon consciente ou non, Ils sont toujours prêts à aider. D’une façon correspondante, il en est de même avec notre propre être intérieur – le Régent Immortel.

 

N’allez pas imaginer que le Guru nourrit le chéla de connaissance. Il aide le chéla à dénicher la connaissance, à la saisir. Si le chéla se trompe dans ses hypothèses et déductions, le Guru redresse le mental du chéla, par une suggestion ou deux, et lui permet de reprendre son voyage du cœur-mental. Les tests et épreuves qui marquent la vie du chéla sont des faits. Nous nous trompons quand nous pensons que la chaleur et le froid sont des sensations en elles-mêmes ; il n’en n’est rien. C’est nous qui les ressentons comme telles parce que nous avons un corps. De même, joies et chagrins sont éprouvés et connus parce que nous avons une nature émotive et une nature mentale. Le Maître montre la voie permettant d’atteindre le niveau dégagé où nous nous séparons de la chaleur et du froid, du plaisir et de la douleur, de l’honneur et de l’ignominie. Le 1er de ces couples à être surmonté est le dernier cité. Ce sont chaleur et  froid éprouvés dans le corps qui sont les derniers à disparaître.

 

Pour ce qui est de frapper à la porte : l’audace est l’une des qualités requises. S’emparer du royaume cieux par la violence implique que la vie du chéla n’est pas faite pour des « saints de légende ». Les pécheurs sont amenés à repentance et les mentalités défectueuses sont ramenées à la santé. Bien sûr, l’humilité doit toujours être là, sinon on est perdu. La condition de chéla se prolonge au fil de nombreuses vies. Il est question de 7 ans [de probation] mais cela était valable au temps jadis, lorsque le Guru était physiquement proche pour que l’on courre vers lui. De nos jours, avec la génération présente, la probation elle-même se prolonge sur plus d’une vie.

 

Il y en eut d’autres qui réussirent, en dehors de Damodar et Judge. Mais vous n’êtes pas correct dans votre déduction que, dans les premières années, l’état du disciple était relativement plus facile à atteindre. La seule et unique différence tient à ce que, dans chaque cycle séculaire, pendant les premières 25 années, l’effort des Maîtres se fait ouvertement, et on en parle, tandis que, dans les 75 années qui restent, la retraite, le secret et le silence sont plus complets, et le deviennent de plus en plus. A l’époque, on parlait d’EUX et Ils œuvraient, par le canal de H.P.B. et d’autres chélas d’une façon plus ouverte. Mais, par la nature même et « la technique » de la vie du disciple, il lui est impossible de se relâcher. Nul n’a jamais échappé à la probation et nul ne le peut ; mais il est possible qu’une personne soit en probation sans le savoir dans sa conscience cérébrale de veille ; par exemple, un être peut être devenu un chéla en probation dans une vie, et avoir fait un bon progrès ; il accède ensuite au Devachan ou même retourne immédiatement à un nouveau corps ; dans la mesure de son progrès, il poursuit sa vie de probation dans ce nouveau corps et avec ce nouveau cerveau. Par conséquent, il est bon de se souvenir que les difficultés et les moyens qui caractérisent la vie du chéla sont nombreux et variés.

 

Quant à la durée de la probation : elle n’a pas changé ; à l’époque, elle était de 7 ans et elle est toujours de 7 ans actuellement. Mais, alors comme maintenant, les gens n’en sortent pas et 7 ans deviennent 70, et même s’étendent sur plus d’une vie. La vie elle-même est ce qui sert de test. « Grand Crible » est le nom de la “Doctrine du Cœur”, ô disciple » (Voix, p. 44) [N.d.T.]. Les tests de l’Occultisme, ou de la Doctrine Secrète, surviennent comme des événements dans notre vie, jour après jour. Nous devenons fatigués par les attaques que nous lancent l’existence et la vie que nous menons. Pour poursuivre son effort, apprendre, et ainsi croître, l’être en probation a le recours de la “Doctrine du Cœur”. Il lui est dit ce qu’il doit faire. Il lui faut affronter ses « péchés d’omission et de commission » à l’aide des Enseignements. Les gens finissent par perdre leur enthousiasme ; la sincérité, qui dépend de l’enthousiasme, en souffre. Il faut refaire le plein de vigueur spirituelle.

 

 

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[1]    Cahier théosophique n° 45  [N.d.T.]

 

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